Sophie Guitter - promo 1982 - sur scène
Critique de Franck Bortelle - http://www.theatrorama.com - 16 juin 2012
Un chien dans ma vie
On a souvent besoin…
Deux excellents comédiens mènent cette fable cynophilo-psychanalytique fort drôle qui n’en demeure pas moins profonde et même cruelle. Un spectacle original pour tous, qui plus est dans un lieu qui mérite vraiment le déplacement.
Un pauvre chien abandonné décide d’entamer une psychanalyse chez une vétérinaire qui ne semble pas vraiment posséder l’art de guérir ses « patients ». Au fil des séances, le plus mal en point ne va pas s’avérer être celui qui se fait soigner…
Nous sommes clairement dans le registre de la fantaisie avec tous les codes inhérents au genre. L’animal parle, répond au téléphone et va même jusqu’à se coucher sur le divan. De ce procédé vieux comme le monde qui consiste à humaniser l’animal, Sophie Guiter a tiré un texte d’une étourdissante originalité, jouant sur l’adage de La Fontaine « On a souvent besoin d’un plus petit que soi ». Il s’agit ici de mêler la psychanalyse au règne animal pour dresser de l’homme, empêtré dans ses soucis quotidiens et ses comportements parfois scandaleux à l’endroit de son plus fidèle compagnon, un portrait aussi juste que désabusé. Et aboutir à ce transfert qui donne à réfléchir sur celui qui finit par avoir le plus besoin de l’autre.
Le début du spectacle est souvent fort drôle et gagne en gravité au fur et à mesure que la farce animalière est admise et que la fragilité des personnages se dévoile. Joie et désespoir s’y côtoient de prés avec un permanent souci de véracité. Dans sa proposition de mise en scène, Nathalie Boutefeu a mis l’accent sur les deux personnages. Sophie Guiter dans le rôle de la véto est parfaite, sans charger son personnage d’une trop forte empathie mais en le laissant nous envahir par sa déréliction croissante. Le chien, c’est Thierry Gibault, comédien étonnant qui développe une palette de jeu assez saisissante. Chapka sur la tête et manteau écossais sur le dos, il prend avec une confondante aisance ce rôle difficile sans jamais le faire sombrer dans le ridicule. Si l’on excepte un léger flottement dans la mise en scène pour suggérer le temps qui passe, ce spectacle a tout pour séduire dans ce lieu insolite qu’est le Grand Parquet, théâtre convivial et chaleureux qui depuis 2006 offre une programmation ambitieuse et éclectique au cœur d’un quartier parisien populaire.
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